Entre deux bouffées de cigarette, mon grand-père me compte son existence, sur la route qui conduit à sa maison ; ici, il a rencontré ma grand-mère, là-bas il a été placé dans une famille par l’assistance publique ou encore, sur cette place, il aurait pu perdre la vie car son chien avait mordu un officier allemand.
Nous arrivons et rentrons dans sa demeure, ancien point de ralliement de notre famille où il a passé les relais, à mon père puis à moi et enfin à mes deux fils.
En une année à peine, son foyer est en train de pourrir, assaillit par les « traitrises » du temps. Nous nous regardons et ne sommes pas dupes de ce qui se passe à travers ce silence et cette forte odeur de renfermé. Il s’assoit, se roule une autre cigarette, et me dit de prendre ce que je désire. Puis nous allons dans le jardin, où les fruits pourrissent au sol car il n’y a plus personne pour les ramasser. Je remplis deux paniers de pêches et de poires afin de lui faire plaisir.
Nous repartons et il retourne dans les souvenirs.
Lorsque nous sommes de retour à la maison de retraite, il me confit que plus rien ne changera pour lui, et que le retour à la terre est proche.
C’est pour moi comme l’annonce de la fin d’un monde.